Raven - Chapitre 12

Auteur : gag_jak

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(nb : ce chapitre est en réalité le prologue de ce que nous appelerons le "Tome 2". Si vous ne l'avez pas encore fait, je vous encourage à lire le nouveau prologue du "Tome 1", il y contient des informations importantes pour la suite de l'histoire. Et notamment pour la compréhension de certains détails de ce chapitre. En cas d'incompréhension, vous pouvez toujours poser vos questions en commentaire xD)

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Déchéance
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« Faisons une pause. Il est temps. Cela fait un moment maintenant que je raconte ma vie. Tu dois en avoir marre, probablement. Mais tu vois, jusque là, je n’ai uniquement raconté que le côté négatif. Je suis loin de tout cela à présent. J’étais Raven. Un Raven puéril, stupide. J’étais Raven, je suis Le Prédateur. Un nom que tu m’as attribué, et que j’ai toujours trouvé mal choisi. Je suis différent à présent. Mes actions, mes pensées, ma psychologie, ma volonté, mes motivations… tout a changé, et ce à peu près depuis que tu m’as donné ce nom, Le Prédateur. Mais je suis loin d’être un prédateur… Le plus ironique, c’est que l’époque où j’étais le plus proche d’un prédateur, celle où je tuais encore des innocents dans la rue, juste pour le plaisir, juste parce qu’ils étaient à un endroit et que je voulais les voir dans plusieurs à la fois ; cette époque où tuer au hasard m’apportait une sensation jouissive, où j’aimais jouer avec mes victimes comme un prédateur joue avec ses proies, c’était quand j’étais encore Raven. Quand l’univers entier me connaissait encore sous ce nom. Maintenant, rares sont ceux qui parlent de moi en tant que Raven, tous me connaissent sous le nom du Prédateur.
Mais si vous tous, vous me prenez pour un prédateur, c’est bien que vous ne me connaissez pas, que vous ne me comprenez pas. Vous n’avez pas suivi mon évolution. Par contre, je dois bien avouer que je suis flatté que des milliards de personnes se considèrent comme mes proies. Mais ce n’est pas cela l’important… Qu’importe le nom que vous me donnez, ça ne change rien. L’important est que ma mentalité a évolué. Cependant, je reste un meurtrier. Je tue, encore et encore. La seule différence est que, lorsque j’ai des pulsions, je les contrôle, je les contiens, je ne les laisse pas m’envahir, ni me contrôler. Je suis beaucoup plus calme, et beaucoup plus réfléchi. Beaucoup plus dangereux, car organisé. Tout ce que je fais est longuement travaillé, rien n’est laissé au hasard. Mais jamais, jamais je ne tuerai quelqu’un sans raison.
Même pour ce qui se passe dans ce bâtiment, j’ai des raisons. J’ai de très bonnes raisons de tuer tous les hommes de ton unité, pendant que toi, ici, tu regardes une pauvre vidéo de moi te racontant ma vie, et que tu ne peux absolument rien faire d’autre que me regarder… Alors que moi, en attendant que cette vidéo se termine, j’extermine tes coéquipiers… »

Je hurle de rage. Ca ne sert à rien, je le sais, mais j’en ai besoin. Je hurle de toutes mes forces, mon cri exprimant toute ma haine. Ma haine envers Raven Cognito, Le Prédateur. Je me lève de mon siège, attrape mon fusil, et mitraille les rangées de chaises devant moi. Elles volent en éclats. Je perds mon sang froid. Je ne supporte pas d’être enfermé là, à ne pouvoir rien faire, à devoir écouter ce fou furieux me parler de sa vie. Je n’en ai rien à faire de sa vie ! Je me contrefous de sa hantise pour son père, de sa relation avec Lange, et de tout le reste ! Tout ce qu’il a pu faire, je m’en tape. Ca ne change rien ! Il reste un criminel, un dingue. Un dingue qui me fait péter un plomb. Ma décharge de rage m’a essoufflé. Pendant son récit, j’ai toujours gardé un œil sur les données que comporte ma visière. En particulier sur celle qui indique si mes hommes sont toujours vivants. Le dernier point restant vient de s’éteindre, et la vie de Ridley Rockoff avec lui, le meilleur élément de mon unité. Ils sont tous morts à présent. Je suis maintenant seul dans ce bâtiment, seul avec Le Prédateur.

Son image sur l’écran géant de la pièce est toujours présente, et il est toujours en train de parler. Mais je ne l’écoute plus, ma fureur est trop grande. Je n’en peux plus, je ne peux pas en supporter davantage. D’ailleurs, il est temps que j’arrête de me laisser dominer, j’en ai marre de son histoire, marre de sa vie, marre de lui. Ma respiration est bruyante à cause de la colère. Je pointe mon arme sur l’écran et m’apprête à vider mon chargeur dessus.
« Calme-toi !! » La voix du Prédateur résonne dans mon oreillette, si forte et accompagnée d’un autre son si aigu que mes tympans explosent presque. Je laisse tomber mon arme immédiatement. La douleur est trop forte, je plaque mes mains sur mes oreilles. Perdant l’équilibre, je tombe à genoux. Il ne parle plus, mais le bruit aigu et strident s’amplifie, de plus en plus intensément, faisant vibrer mes tympans dangereusement. Je m’étale de tout mon long. Un nouveau hurlement envahi la vaste pièce, mais celui-ci est de souffrance. La douleur est insoutenable. Je voudrai enlever mon oreillette, mais je n’y parviens pas. Elle est toujours solidement fixée pour que dans le tumulte des batailles elle ne tombe pas. Je crois que j’hurle plus fort que je n’ai jamais hurlé, mais je n’en sais rien : je ne m’entends pas. Je me sens écrasé par une masse effroyable, la tête compressée ; je sens mon cerveau imploser, de grosses gouttes de sang couler de mes oreilles. Tout ça à cause d’un bruit, un bruit infernal. J’ai envie de m’exploser le visage contre le sol pour calmer la douleur dans ma tête, car c’est bien dans ma tête que ce bruit agit, il détruit l’intérieur de mon crâne. J’ai du mal à imaginer pire souffrance.
Pourtant il me prouve que c’est possible ; venant accompagner la douleur déjà présente, mon armure toute entière se met à m’envoyer des décharges électriques puissantes. Mes muscles se crispent. La décharge continue son effet pendant une quinzaine de secondes. Mon supplice également. Je n’ai même plus conscience de ce qui m’arrive. Je souffre pire que jamais, je le sais, mais je ne comprends pas le reste. Mais, soudain, tout s’arrête. Le son et la décharge se stoppent. Je me sens d’un coup béni. J’apprécie le moindre centième sans torture, je me surprends même à sourire de soulagement. J’ai toujours mal, mais tellement moins qu’avant que je ne sens presque pas cette douleur. Pendant un instant, je me sens libre, tellement libre…
Je ne le suis pas.

« Je contrôle toute la technologie que tu as sur toi – me dit-il d’un ton satisfait, toujours dans mon oreillette – je peux voir tout ce que tu fais… et tu allais faire une très grande erreur. Je ne pouvais pas te laisser la faire, tu l’auras regretté, il fallait que je t’en empêche…
- Pitié, fous-moi la paix… » Ma voix est faible, réduite à un murmure. Je m’étonne de ne pas être sourd. Mais je ne vais pas m’en plaindre.
« Je ne peux pas, je suis désolé. Tu dois comprendre qu’il est très important que tu écoutes tout ce que j’ai à te raconter. Très important pour toi, même. Je t’ai déjà révélé que Raven Cognito allait se faire arrêter ce soir. Je n’ai pas menti. Mais ce ne sera pas la fin pour moi… Je vais te révéler mon plan, et quoi faire par la suite. Mais je ne peux pas te le dire tout de suite, car le seul moyen pour que tu le comprennes est que tu écoutes mon histoire, pour savoir comment j’en suis arrivé à là, à ce plan. Il faut que tu regardes la suite. » Je m’aperçois que la vidéo est en pause, je ne m’en étais même pas rendu compte. Il a l’air sincère dans ce qu’il dit, mais je sais que c’est à cause de son talent de manipulateur. C’est un sadique, un psychopathe, je ne peux pas le croire. Il ne se laissera jamais capturer.
« D’accord – fais-je – je vais écouter la suite de ton histoire. » Je ne peux pas le croire, non, mais je n’ai pas le choix. Si je ne coopère pas, il me fera souffrir bien plus encore. Il n’attend que ça. Et puis, de toute façon, il me tiendra enfermé ici. Je suis pris au piège, et lui résister ne m’apportera rien. De plus, peut être que son histoire est réellement importante… Il n’y a qu’une seule façon de le savoir.

« Bien – se réjouit-il – tu fais le bon choix. Lève-toi, et retourne t’asseoir. » Je voudrai bien l’y voir… Mes muscles sont tout ankylosés et je n’ai plus de force. Je me lève lentement. Chaque mouvement nécessite un grand effort, mais je finis par attraper mon arme et m’en sert comme appuie pour me lever, puis de canne pour me trainer jusqu’aux sièges.
« Voilà, tu y es – dit-il – j’ai avancé la vidéo jusqu’au début du chapitre suivant. Comme je te l’ai dit précédemment, à partir de là, tu verras ma personnalité évoluer vers celui que je suis maintenant. Vers Le Prédateur. Tu en étais quand je commençais à vivre avec Lange à Black Water, quand nous étions à la recherche de réponses à nos mystères, à pourquoi nos pères avaient-ils essayé de détruire leurs familles. Je te laisse regarder la suite… »

L’écran se rallume sur l’image du Prédateur me fixant, me relatant son histoire avec passion, ainsi qu’avec un grand talent de conteur. Son talent ne venait pas spécialement de ce qu’il disait, mais de la façon dont il le disait. Il y mettait une intensité remarquable, accélérant le rythme aux moments de démence, devenant sombre dans ceux où ses pensées étaient mornes, mimant même certaines actions. Mais s’il est un grand conteur, il reste mon ennemi. Un psychotique. Un dégénéré qui ne pense qu’à tuer, qu’à répandre le mal. Un fou qui me raconte sa vie de fou. Et même si sa vie est loin d’être celle que j’imaginais, et que maintenant, je le vois un peu comme un pauvre type qui n’a pas eu de chance, qui a mal tourné suite à un traumatisme, il reste ce fou, ce psychopathe qui terrifie la galaxie. Celui qui a tué un grand nombre de mes amis, et qui est coupable d’un nombre de meurtres incroyable, ainsi que de vol, de trafic, de destruction, et j’en passe.
Et je le hais. Et je n’ai qu’une envie : le tuer, lui faire mal, lui rendre les coups qu’il m’a portés. Le faire souffrir, comme il m’a fait souffrir, autant physiquement que psychologiquement. Mes mains se resserrent sur mon arme. A ces pensées, je me rends compte que je ne suis pas si différent de lui. Je raisonne comme lui raisonne pour Slim. Je deviens comme lui.
Et alors ? Je le hais. Il doit mourir. Et je le tuerai. Je le jure.

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